La tenue vestimentaire est protégée par la Constitution fédérale. Une telle protection relève aussi bien de la liberté personnelle que de la liberté d’expression.
Toutefois, le choix des vêtements, portés par les employés, comme moyen de liberté d’expression, peut se heurter au devoir de protection de la personnalité, à la sécurité au travail et aux intérêts prépondérants de l’employeur. Dans ce cas, la liberté des travailleurs peut être restreinte.
La sécurité avant tout
L’article 6 LTr impose à l’employeur de prendre toutes les mesures que l’on peut raisonnablement exiger de lui pour protéger la santé et la sécurité de ses employés. Il est tenu d’imposer, selon les circonstances, le port de vêtements de protection, du casque ou de chaussures de sécurité.
Les règles de protection de la santé du travailleur ne doivent pas rester lettre morte. L’employeur a le devoir d’édicter des directives claires, d’informer les employés et de surveiller leur mise en œuvre. Les salariés sont dans l’obligation de collaborer et de porter les équipements de protection. Le refus persistant du travailleur de suivre les consignes peut faire l’objet d’un licenciement ordinaire et, en cas de violation grave, d’un licenciement immédiat en fonction des circonstances.
Lorsque les directives vestimentaires ont pour objectif de protéger la santé des travailleurs, la question de la protection de la personnalité passe au second plan. Même en périodes de canicule, l’employeur est en droit d’interdire à un soudeur de travailler en débardeur ou à un maçon de porter un short. Un cariste ou un magasinier qui viendrait au travail en baskets doit être contraint à porter des chaussures de sécurité.
- Un ouvrier a travaillé sur un chantier sans son casque, pourtant obligatoire, alors qu’il montait sur une échelle à proximité de tiges métalliques dépassant du plafond. Il s’est exposé à un danger indéniable. L’ouvrier a ensuite déclaré qu’il n’envisageait pas de travailler, 8 heures par jour avec un casque. Dans la mesure où l’employeur lui avait déjà rappelé à plusieurs reprises l’obligation de port du casque, le Tribunal fédéral a considéré son licenciement immédiat comme justifié.
Image de l’entreprise
Les intérêts légitimes de l’employeur, pour préserver l’image de son entreprise, peuvent entrer en conflit avec la liberté personnelle de l’employé. Les règles du code vestimentaire doivent être justifiées par un besoin d’entreprise et respecter le principe de la proportionnalité. Elles ne peuvent en aucun cas être chicanières et doivent respecter l’égalité de traitement.
Les employés, en contact avec la clientèle ou des fournisseurs, agissent comme représentants de l’employeur. La nécessité de préserver la clientèle et l’image de l’entreprise prime sur la liberté personnelle du salarié. L’employeur peut exiger que ses employés adoptent une tenue adéquate.
Le droit de donner des directives vestimentaires est d’autant plus étendu en fonction du standing de l’entreprise et des usages de la branche.
Dans le domaine bancaire et des assurances, il est d’usage d’imposer le port du costard-cravate à ses collaborateurs. Les entreprises, actives dans la vente et la distribution de produits de luxes, peuvent imposer une tenue qui est en adéquation avec leur image.
- La Chambre des prud’hommes de Genève a considéré que le licenciement immédiat d’un représentant en contact avec la clientèle, en raison de son refus de renoncer à son catogan, était injustifié. Elle a jugé que ce refus justifiait, tout au plus, après un avertissement, un congé ordinaire.
Pour les collaborateurs, sans contact visuel avec la clientèle, les fournisseurs ou les partenaires commerciaux, la situation est différente. Les directives vestimentaires n’ont pas de lien direct avec l’exécution de leur prestation de travail. Pour ces employés, les directives sont plus limitées. Une employée qui travaille aux archives pourrait ainsi porter des jeans et des baskets.
Lutte contre le harcèlement sexuel
Selon l’article 328 CO et 4 LEg, l’employeur est contraint de respecter et protéger la personnalité du travailleur. Il doit ainsi veiller à ce que ses travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement.
En conséquence, l’employeur est impérativement tenu de veiller à la décence des tenues vestimentaires de ses collaborateurs. Cette obligation a pour objectif de protéger aussi bien la personnalité des collaborateurs en question que celle de leurs collègues. L’employeur est tenu d’agir dans l’hypothèse où une collaboratrice mettrait une tenue trop suggestive et lui demander d’adopter une tenue plus réservée.
Retrouvez l’expertise de Marianne Favre Moreillon, directrice et fondatrice du cabinet juridique DroitActif et EspaceDroit, dans plus de 600 articles